Vinca Riviere
Axes de recherche
Ontogenèse et phylogenèse du contrôle temporel: études chez de jeunes enfants et des enfants présentant des troubles du développement
La position standard en analyse expérimentale du comportement considère le contrôle temporel et son émergence comme un processus discriminatif. Nous estimons pour notre part qu’il s’agit d’un comportement issu de la dynamique dans la contingence de renforcement du lien renforçateur-réponse. Nous avons donc poursuivi les recherches que nous avons menées à la fois chez l’animal et le jeune enfant ayant des troubles du développement. Les enfants hyperactifs mais aussi les enfants autistes pourraient nous aider dans la compréhension de la mise en place du contrôle temporel. Les comparaisons, difficiles à réaliser entre l’animal et le bébé, ont pu être réalisées chez des jeunes enfants (8-10 mois) et chez des enfants avec trouble du développement (autistes, hyperactifs) en utilisant des procédures strictement identiques. Le dispositif déjà testé chez le bébé à partir de 3 mois s’est avéré adapté pour tester les compétences de discrimination d’enfants avec autisme.
Nous pouvons observer que les enfants avec autisme présentent des compétences de discrimination temporelle extrêmement développées en comparaison aux enfants typiques. La précision des réponses lors d’un programme à intervalle fixe a été particulièrement observée. Par contre, nous avons noté que ces enfants sont particulièrement résistants au changement, mettant plus de temps que les enfants typiques à modifier les patterns de réponses en fonction du programme de renforcement auquel ils étaient soumis. Il nous semble important de pouvoir cerner le rôle du paramètre temporel de la relation réponse-renforçateur, notamment la liberté d’apparition d’un comportement particulier ou d’une préférence pour une des deux conséquences disponibles. Par exemple, les délais variables pour obtenir les renforçateurs sont préférés à des délais fixes. Les conséquences immédiates ont plus d’impacts que celles qui sont différées.
Variabilité comportementale et résistance au changement
Bien que les comportements de stéréotypies et un répertoire comportemental restreint restent une caractéristique diagnostique de l’autisme ou de troubles envahissant du développement, les recherches focalisées sur de tels comportements ont été négligées. Les comportements répétitifs ou un répertoire comportemental restreint peuvent être une entrave significative au développement des personnes avec autisme. La plupart des études se sont focalisées sur des interventions basées sur les conséquences, notamment pour réduire les comportements de stéréotypies eux-mêmes ou les problèmes occasionnés par les comportements répétitifs. De nombreuses études montrent que le renforcement augmente de façon significative la diversité de comportements à la fois chez les non humains et chez les humains. Comment peut-on expliquer le fait que le développement puisse être ainsi perturbé sans qu’aucune cause neurologique ne soit observée ? L’hypothèse serait que la notion de variabilité semblerait essentielle au développement. Grâce à cette variabilité comportementale, le sujet peut découvrir de nouveaux comportements pour atteindre un objectif, générer de nouvelles combinaisons ou produire de nouvelles avancées scientifiques ou artistiques. Chez certains sujets, cette variabilité est extrêmement réduite alors que pour d’autres au contraire, elle est accrue. Pouvons-nous augmenter ou réduire cette variabilité ? Peu de chercheurs s’orientent vers de telles questions. Les troubles observés chez des enfants avec autisme semblent mettre en évidence un défaut de variabilité. Lorsqu’on s’intéresse au développement précis de ces enfants, on s’aperçoit que la variabilité des réponses est extrêmement réduite et certains comportements peuvent persister toute la vie de l’individu sans que le pattern n’en soit modifié. Ceci pourrait rendre compte des déficits comportementaux observés chez ces enfants au cours du développement.
Discrimination des expressions faciales chez le bébé et chez l’enfant avec autisme
Des études récentes ont souligné l’importance de l’expérience visuelle dans le développement de la perception des visages. L’ensemble des données de la littérature suggère qu’il y a une période sensible pendant la première année de la vie concernant le développement de la perception des expressions faciales. L’exploration de cette période peut nous permettre de fournir des explications sur la façon dont ces comportements se mettent en place chez l’enfant neurotypique mais aussi lors de troubles développementaux neurologiques. En effet, certains troubles, comme le spectre d’autisme, sont définis par des critères comportementaux concernant l’altération des interactions sociales entre autres. Aucun de ces symptômes ne semble impliquer des déficits perceptifs des récepteurs. Cependant, il semble que les perturbations de la perception engendrent une altération de la communication sociale.
Nous avons étudié le développement des comportements de discriminations visuelles pour obtenir des éléments supplémentaires sur le rôle de l’environnement dans la mise en place des comportements chez le très jeune enfant. Obtenir des éléments de dépistage chez l’enfant avec trouble du développement reste une priorité de ces recherches. Elles ont permis de mettre en évidence différents éléments qu’il nous faudra encore consolider.