
David Alain Mouloungui
Publications
Les miliciens lettrés Gabonais dans la garde régionale, 1933-1939
La thématique de « professionnalisation policière » se pose avec acuité en histoire militaire, mais aussi dans la société coloniale gabonaise. La professionnalisation policière au Gabon en situation coloniale est le processus de qualification et d’autonomisation professionnelle des policiers afin de susciter l’esprit d’efficace, de professionnalisme des agents dans l’exercice de leur fonction. Le processus revêt un caractère plus qu’un important pour les autorités coloniales, car à long terme elle permettra l’épanouissement social des policiers coloniaux. La période 1933-1939, est marquée par une fréquentation accrue des Gabonais dans les écoles missionnaires pour y recevoir les connaissances afin de mieux appréhender l’organisation de la société coloniale et exercer dans les institutions coloniales. La notion de « lettré » ici durant cette période renvoie à des individus ayant fait leurs études primaires dans les établissements d’enseignement primaire catholique. Il exclut la notion de « diplômé » qui n’est pas encore une modalité d’emploi dans la colonie du Gabon. Un lettré est celui qui possède un certain nombre d’acquis dans un domaine linguistique. Pour la colonie du Gabon c’est la langue française, langue officielle coloniale de communication. Les « lettrés » ont des rudiments nécessaires à la pratique de celle-ci, malgré cette absence de qualification à travers un « diplôme » de maitrise de la langue française. Il faut dire que les « lettrés » paramilitaires de la garde régionale n’ont jamais prévu faire une carrière d’homme de troupe, c’est souvent par les conseils de leurs amis ou compatriotes ou parfois même par admiration d’une personne qui est perçue comme un « modèle ». Celle-ci suscite auprès des futures recrues admiration et bravoure. C’est avec cette influence psychique que ces jeunes décident de s’engager à défendre la souveraineté coloniale de la France. A cela s’ajoute les aspects socio-économiques et professionnels qui habitent les Gabonais à travers les privilèges qui sont accordés quant à l’exercice du service colonial. Être jeune « lettré » gabonais au sein des troupes paramilitaires coloniales favorise-t-il le développement socio-professionnel du Gabonais dans sa carrière policière ? Est-ce un avantage pour l’ascension à des échelons supérieurs selon les conditions de la hiérarchie en vigueur dans la colonie du Gabon ? Les politiques coloniales en faveur de l’épanouissement et du développement des Gabonais travaillant dans la police coloniale avec le statut de « collaborateurs » sont-elles un pas vers la « professionnalisation policière au Gabon » ? Pour répondre à toutes ses interrogations, nous avons eu recours à des multiples rapports d’archives, des enquêtes oraux et quelques références bibliographiques.