Benoit Fresse
- FACULTE DES SCIENCES ET TECHNOLOGIES
- DEPARTEMENT MATHEMATIQUES
Présentation
Je travaille sur la théorie des opérades et ses applications en topologie algébrique et en algèbre homologique. Une opérade est une structure algébrique dont les éléments représentent des opérations. Les catégories d'algèbres usuelles, comme les algèbres associatives et commutatives, les algèbres associatives, les algèbres de Lie, et les algèbres de Poisson, sont toutes associées à des types d'opérations qui engendrent des opérades. La notion d'opérade a été introduite en topologie, fin des années 60, pour étudier la structure des espaces de lacets itérés. Les opérades ont été utilisées fructueusement dans d'autres domaines depuis lors et il est devenu clair que cette notion fournit un outil conceptuel et effectif pour gérer des structures algébriques multiples dans des contextes variés.
Une idée centrale de mes travaux est l'utilisation de modules sur les opérades pour comparer les catégories d'algèbres associées à des opérades. La forme la plus aboutie de ces recherches a été publiée dans le livre [2009a] de la liste de mes publications. Le principal résultat nouveau de ce livre est un théorème d'invariance homotopique général affirmant que, sous des hypothèses de cofibration habituelles en théorie de l'homotopie, des foncteurs associés aux modules sur les opérades préservent les équivalences d'homotopies.
Les travaux de Jean-Pierre Serre dans les années 50 ont introduit l'idée d'utiliser l'homologie d'espaces de lacets en topologie. J'ai pu construire un modèle algébrique des lacets itérés en utilisant le produit de mes recherches sur les modules sur les opérades. En utilisant ce résultat, j'ai montré dans l'article [2011c] que la cohomologie d'un espace de lacets n-itéré sur un espace X se détermine par une théorie homologique opéradique, définie de façon purement algébrique, que l'on applique à l'algèbre des cochaînes de X. Une des visées ultimes de mes recherches est d'utiliser ce modèle pour comprendre la cohomologie de certains espaces de lacets itérés et pour déterminer des classes dans l'homotopie d'espace.
Motivé par cette étude des modèles algébriques de l'homotopie des espaces de lacets itérés, j'ai entrepris une série de recherche sur l'homotopie des opérades En, les opérades qui interviennent dans la définition de ces modèles. Ces objets, où n=1,2,...,∞ est un paramètre de dimension, reflètent une hiérarchie de structures commutatives à homotopie près, de pleinement homotopiquement associatif mais non-commutatif (n=1) à pleinement homotopiquement associatif et commutatif (n=∞). La théorie du calcul des plongements de Goodwillie-Weiss, qui montre que les espaces d'application d'une opérade Em dans une operad En détermine le type d'homotopie des espaces de plongements entre espaces euclidiens, donne une autre motivation pour l'étude de ces objets.
Dans le livre [2017a], j'ai montré que le groupe des auto-équivalences d'homotopie rationnelle d'une opérade E2 (le groupe des classes d'automorphismes homotopiques rationnels) s'identifie au groupe de Grothendieck-Teichmüller rationnel (le groupe introduit par Vladimir Drinfeld en théorie des groupes quantiques en utilisant des idées du programme de Grothendieck en théorie de Galois). Le but de mes recherches en cours est d'aller plus loin dans l'étude des groupes d'auto-équivalences d'homotopie des opérades En, en toute dimension n≥2 (le cas n=1 étant trivial), afin de comprendre des symétries internes des structures commutatives à homotopie près. Dans cette direction, j'ai montré dans un travail en collaboration avec Victor Turchin (KSU) et Thomas Willwacher (ETHZ) que des variantes des complexes de graphes de Kontsevich détermine le type d'homotopie des espaces d'auto-équivalences d'homotopie rationnelle des opérades En, pour tout n≥2, ainsi que le type d'homotopie rationnel des espaces d'applications d'une opérade Em dans une opérade En, pour n≥m≥1 (voir [2017pre]). Le prochain objectif de mes recherches est d'explorer des généralisations possibles de ces résultats dans le cadre de la caractéristique positive.