Annick Rivens Mompean
Axes de recherche
Mes travaux portent sur l’innovation et les changements apportés par les TIC (Technologies de l'Information et de la Communication) dans le domaine de l’enseignement/apprentissage des langues. Ces questions sont abordées dans une approche pluridisciplinaire, voir interdisciplinaire et traitent tant des productions langagières des apprenants (en interaction écrite ou orale) que des modalités d’apprentissage (développement de l’autonomie et dispositifs d’apprentissage médiatisés) ou encore du contexte institutionnel qui accueille ces pratiques, avec une approche d’ingénierie de la formation autour du rôle des acteurs (formation d’enseignants, rôle de l’apprenant, reconnaissance institutionnelle). Je revendique pour cela une approche par la complexité qui seule permet de prendre en compte des questions qui touchent à plusieurs niveaux de la formation (macro, méso, micro), avec des croisements interdisciplinaires à construire. Mes travaux peuvent être regroupés selon quatre grandes thématiques :
1. Communication Médiatisée par Ordinateur et apprentissage des langues
Les TIC correspondent à une révolution des écritures (Rivens Mompean, 2003). Dans les courriers électroniques, sur les forums ou dans les blogs, l’usage qui est fait de l’anglais, par les locuteurs natifs et par les locuteurs étrangers qui sont de plus en plus nombreux, est révélateur d’un statut hybride, à mi-chemin entre l’écrit et l’oral. (Rivens Mompean, 2003b).
Du fait de l’introduction de plates-formes pédagogiques (avec forum) dans les pratiques d’enseignement/apprentissage, de l’usage des blogs pour l’écriture, la CMO doit également être envisagée du point de vue de la plus-value qu’elle peut apporter pour les pratiques de production écrite (Rivens Mompean, 2007 et 2010) qui incluent l’écriture collaborative (Loisy, Charnet et Rivens Mompean, 2011) et l’interaction orale ou écrite envisagée avec le recours à des outils de visioconférence dans le cadre d’un échange de type tandem (Rivens Mompean et Cappellini, 2014 ; Cappellini et Rivens Mompean, 2011, 2014). Ces recherches portent sur les pratiques langagières, en prenant en compte la problématique de la correction par le tuteur (Rivens Mompean, 2012) ou à l'aide de correcteurs (O Regan, Rivens Mompean et Desmet, 2010). L’analyse de ces modalités d’écriture a donné lieu à la coordination d’un numéro de la Revue Française de Linguistique Appliquée (Desmet et Rivens Mompean, 2010).
2. Apprentissage des langues en autonomie
Par ailleurs, l’intégration des TIC introduit de nouveaux rapports au processus d’apprentissage. De quelle façon les nouveaux environnements d’apprentissage de langue prennent-ils en compte cette compétence « apprendre à apprendre » qui doit être développée si l’on veut échapper à l’erreur de prendre l’autonomie pour un prérequis ? Quelles stratégies développent ou devraient développer les apprenants pour réussir avec efficacité?
Mes travaux s’intéressent à la façon dont le recours croissant aux TIC renouvelle la réflexion sur les pratiques pédagogiques et le triangle didactique traditionnel. L’autonomie des apprenants est valorisée, alors que les enseignants passent d’un statut de dispensateur de savoir à celui de médiateur (Rivens Mompean et Eisenbeis, 2009). Dans certains dispositifs, l’apprenant devient lui-même une ressource valorisée (Mangiante, Mangenot et Rivens Mompean, 2006 ; Rivens Mompean, 2009b), avec le développement de nouvelles stratégies chez les apprenants qu’il convient de prendre en compte (Rivens Mompean et Guichon, 2009). Quels usages individuels découlent alors de l’introduction des dispositifs numériques (Lozinguez et Rivens Mompean, 2009) ?
3. Approche systémique du dispositif d’apprentissage
On ne peut s’extraire du contexte d’enseignement/apprentissage dans lequel ces dispositifs sont intégrés et il est devenu nécessaire de repenser l’influence et le poids des supports médiatisés, alors que les universités encouragent la mise en place d’espaces numériques de travail (Rivens Mompean et Benoit, 2010; Rivens Mompean, 2011 a et b). Il faut également s’assurer de l’appropriation par les acteurs dont les rôles changent (Rivens Mompean et Guichon, 2013 ; Guichon et Rivens Mompean, 2006), avec la notion de tutorat et feed-back à prendre en compte (Rivens Mompean, 2012) et la notion d’ingénierie pédagogique à intégrer dans la formation des formateurs (Barbot et Rivens Mompean, 2011). Quelles variables doivent alors être prises en compte pour que cette intégration soit optimale pour tous les partenaires du contrat pédagogique (apprenants, enseignants, institution) (Rivens Mompean et Barbot ed, 2009)? Quels sont les leviers qui permettent de développer ces nouvelles pratiques (Rivens Mompean, 2011 et 2012a) et quelles évolutions sont perceptibles dans cette mise à « distance » via les technologies (Rivens Mompean, 2011b) ?
Ces questionnements peuvent se poser sous l'angle plus spécifique des Centres de Ressources en Langues qui sont le lieu d'expérimentations pédagogiques et de recherche (Rivens Mompean, 2013) ou dont le lien avec le secteur LANSAD doivent être explicités (Rivens Mompean et al. (ed.), 2015). L’analyse des pratiques posant la question de l’autonomie (Rivens Mompean, 2004; 2012), celles-ci doivent être mises en miroir avec la question de la reconnaissance de ces pratiques au sein de l’institution (Rivens Mompean, 2009; Rivens Mompean et Scheer, 2003) et de nouveaux objectifs de formation qui s'y développent, comme c'est le cas des certifications (Rivens Mompean, 2011). Par ailleurs, les visées certificatives posent la question du développement des compétences et des dispositifs permettant de les accueillir (Rivens Mompean, 2011 ; Tardieu, Reichert et Rivens Mompean, 2013).
L’approche systémique permet d’appréhender la question, via la convocation d’une approche par la complexité, et la modélisation en vue d’interpréter et valider par la recherche des systèmes complexes, en empruntant à divers champs disciplinaires qui interrogent les modalités du croisement. C’est l’objet de ma note de synthèse HDR et également de mon ouvrage sur les Centres de Ressources en Langues (Rivens Mompean, 2013) qui permet de construire un domaine encore largement inexploré, qui me fait aboutir au modèle ALADIN qui tisse des liens entre l’Apprentissage des Langues, l’Autonomie, le Dispositif, le contexte Institutionnel et le recours au Numérique. Cette approche par la modélisation ne se restreint pas au contexte des CRL. C’est le cas par exemple du dispositif Tandem/Teletandem (Rivens Mompean et Cappellini, 2014).
4. Apprentissage des langues formels et informels
La transition d’une logique d’enseignement à une logique d’apprentissage ne concerne pas uniquement les usages liés aux TIC, mais aussi l’introduction des langues vivantes en cycle primaire, avec des recherches menées sur les modalités d’enseignement de l’anglais en milieu scolaire très précoce (grande section de maternelle) ; (Mathiot et Rivens Mompean, 2005 ; Rivens Mompean et Mathiot, 2004). Ces travaux s’intéressent aux spécificités de la communication multimodale en salle de classe entre pairs et avec l’adulte.
Les dispositifs favorisant le développement de l’autonomie d’apprentissage encouragent également l’ouverture de ceux-ci (qui peuvent être de type CRL- Centre de Ressources en Langues, cf. Macré & Rivens Mompean, 2021 ; Rivens Mompean & Eisenbeis, 2022) puisque les apprenants sont encouragés à recourir à des activités pas forcément organisées par l’établissement. Dans ce cadre, se pose de façon aigüe le recours à des ressources dites informelles dont il est toutefois difficile d’analyser les usages, puisque ceux-ci se déroulent justement en dehors du cadre didactisé de l’institution. Les notions d’intention, attention, ou encore incident, peuvent être convoquées à cet effet, à la lumière des travaux de Schmidt (1990) sur la conscience (Babault, Grabowski & Rivens Mompean (ed.), 2022).