Ma thèse

Titre de la thèse en préparation :

Prendre le fusil pour défendre ou renverser les autorités : La Garde nationale à Lyon et à Marseille de 1830 à 1871.

 

Directrice de thèse :

Sylvie Aprile, professeure d'histoire contemporaine à l'Université Paris-Nanterre.

 

Résumé de ma thèse :

      Ma thèse est consacrée aux Gardes nationales de Lyon et de Marseille, de la monarchie de Juillet aux débuts de la Troisième République. Je cherche à approfondir et à compléter les travaux engagés depuis quelques décennies sur la Garde nationale, en proposant une étude comparative consacrée à une période et à des espaces qui n'ont guère retenu précédemment l'attention des chercheur·se·s. La plupart des études consacrées à ce sujet se limite en effet à la période révolutionnaire, et les rares travaux centrés sur le XIXe siècle soit n'évoquent que la Garde nationale parisienne, soit s'en tiennent à une approche juridique et fonctionnelle. Ma recherche a donc pour ambition de combler un vide historiographique en proposant une réflexion comparative centrée sur la milice citoyenne des deux principales villes de province au XIXe siècle, qui ont toutes les deux connu des épisodes insurrectionnels particulièrement marquants.

      Créée au début de la Révolution française par la bourgeoisie parisienne puis rapidement étendue à l'ensemble des communes française, la Garde nationale a tout au long de son existence répondu à deux objectifs : protéger les biens et les personnes dans les périodes de crise politique d'une part, et défendre le processus révolutionnaire d'autre part. Lors de chaque réorganisation, la milice citoyenne est paradoxalement l'une des seules forces à disposer de la puissance et de la légitimé suffisantes pour maintenir l'ordre, tout en portant en elle la contestation du monopole étatique de la violence légitime. Délaissée par le Directoire puis par le Premier Empire, la Garde nationale a été réorganisée à l'occasion de chaque changement de régime au cours du XIXe siècle. La Restauration, la monarchie de Juillet, ainsi que la Deuxième et la Troisième République se sont ainsi systématiquement appuyées sur la milice citoyenne avant de la dissoudre ou de la mettre en sommeil selon les villes.

     Je m'intéresse tout particulièrement aux conditions de réorganisation des milices lyonnaise et marseillaise en 1830, 1848 et 1870, puis à leur fonctionnement dans les mois ou les années qui ont suivi. La Garde nationale est un objet d'étude qui se prête difficilement à la synthèse, tant les situations locales peuvent différer d'une ville à l'autre. Pour espérer parvenir à des résultats tangibles et pertinentes, il convient donc de l'élaborer sur une période assez longue et à travers différents espaces ; cela permet de multiplier les analyses précises, de les comparer rigoureusement et d'en dégager des implications générales. La démarche comparative a également pour avantage de multiplier les sources disponibles et permet donc de compléter les vides réciproques des archives lyonnaises et marseillaises. On se rend ainsi capable de proposer une histoire sociale de la Garde nationale, tentative qui n'a pu jusqu'alors aboutir, notamment en raison d'un manque de sources.

     Faire une histoire sociale de la Garde nationale consiste par exemple à analyser méticuleusement la composition sociale des compagnies afin de souligner ou de nuancer la rupture qu'a pu représenter la réorganisation de 1848, moment où la milice devient accessible à tous les citoyens et où les conditions de revenu pour y servir sont supprimées. Cela suppose également de réfléchir aux conséquences que le service ou l'obtention d'un grade ont eu dans les trajectoires individuelles et collectives des gardes nationaux ; ou bien encore, d'analyser les sociabilités propres à ce corps situé aux frontières des sphères civiles et militaires, et qui ont pu se maintenir y compris après les dissolutions ou les mises en sommeil de la milice. Cette thèse porte également l'ambition d'explorer les angles morts de l'historiographie de la Garde nationale, tels que l'armement des Gardes nationaux, sa provenance et sa nature, ainsi que l'évolution, tant d'un point de vue quantitatif que qualitatif.

     Force de maintien de l'ordre, la Garde nationale a également été au cours du XIXe siècle un instrument de désordres : comment comprendre cet apparent paradoxe ? La milice citoyenne n'a en effet jamais été pleinement contrôlée par les différentes autorités, et de nombreux gardes nationaux lyonnais et marseillais ont joué un rôle actif dans les insurrections et les troubles qui ont touché les deux villes de 1830 à 1871. C'est le cas notamment en novembre 1831 à Lyon, en juin 1848 à Marseille, ainsi qu'à l'automne 1870 et au printemps 1871 dans ces deux villes. Tandis que des gardes nationaux ont fait le choix de défendre les autorités, d'autres ont au contraire épaulé leur fusil pour tenter de les renverser. Un grand nombre, parfois la majorité, a aussi refusé de répondre au rappel pour assister en spectateurs aux troubles qui ensanglantèrent leur ville. La dernière partie de cette thèse a donc pour objectif de réfléchir aux conditions de participation des gardes nationaux à ces épisodes insurrectionnels, et d'analyser les raisons de leurs choix.

 

 

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