Maître de conférences à l'université de Lille depuis 2015, mes recherches visent à penser ensemble histoire du livre, de l'édition et de la lecture, et histoire de la bande dessinée. Ils s'inscrivent donc à la croisée d'une histoire socio-économique portant sur le marché du livre, d'une histoire littéraire alliant distant et close reading, et d'une histoire des formes visuelles de l'histoire.

Dans la thèse que j'ai soutenue en 2014, L'Effet codex : quand la bande dessinée gagne le livre. L'album de bande dessinée en France de 1950 à 1990, j'ai ainsi mobilisé une analyse simultanée de la constitution d'un marché de la bande dessinée, de l'apparition d'un standard éditorial de l'album et des manières dont une forme de publication affecte les manières de créer, de publier, de transmettre de et recevoir la bande dessinée.

Une telle démarche vise à proposer une histoire de la bande dessinée détachée du canon du 9e art, ainsi qu'à poser les jalons d'une poétique historique du support articulant les lectures théoriques des narrations visuelles aux formes de publication dans lesquelles elles s'inscrivent.

Ma thèse est parue en deux volumes distincts. Le premier, intitulé Publier la bande dessinée : les éditeurs franco-belges et l'album, est paru aux Presses de l'ENSSIB en mars 2018. Il se penche sur la structuration du marché de l'édition de la loi de 1949 sur les publications destinées à la jeunesse à la fin du "printemps des éditeurs" à la fin des années 1980. Le deuxième, centré sur les formes que prend le livre de bande dessinée et la poétique historique du support, a été publié  aux Presses universitaires François-Rabelais (PUFR) dans la collection "Iconotextes" en octobre 2019. Il a pour titre L'Effet livre : métamorphoses de la bande dessinée.

J'ai coordonné, avec Gert Meesters, une recherche collective sur l'histoire éditoriale de la revue (A Suivre), menée à partir des archives de Casterman conservées à Tournai. Ce projet s'est traduit par un ouvrage paru fin 2018 aux PUFR : (À Suivre). Archives d'une revue culte).

En 2023, j'ai publié chez Palgrave Macmillan Ninth Art. Bande dessinée, Books and the Gentrification of Mass Culture, 1964-1975, qui prolonge ces questions à travers l'étude de sept albums-clés, publiés dans la période 1964-1975, qui éclairent de façon inédite les transformations du marché, du paysage et du statut de la bande dessinée au moment où elle bascule vers les mondes du livre. J'y analyse en détail les livres suivants :

  • Barbarella de Jean-Claude Forest (1964), qui éclaire le devenir adulte de la bande dessinée, le rôle de l'éditeur Eric Losfeld, de l'adaptation cinématographique par Roger Vadim (avec Jane Fonda dans le rôle-titre), et le poids de la censure ;
  • Flash Gordon d'Alex Raymond (1968), qui explore l'émergence d'un milieu bédéphile, son rapport à la nostalgie, la place des Etats-Unis dans cette bédéphilie, et la constitution d'un canon par le biais de rééditions patrimoniales ;
  • Astérix et les Normands de Goscinny et Uderzo (1966), qui envisage le bouleversement en profondeur du marché de la bande dessinée sous l'effet du "phénomène Astérix" : en franchissant le cap du million d'exemplaires, la série gauloise transforme radicalement le marché ;
  • Tintin et le lac aux requins d'Hergé (1973), qui explore les phénomènes d'adaptation multimédiatiques, et les enjeux de la création en studio. Le nom d'artiste Hergé recouvre en effet une pluralité d'acteurs de l'ombre, souvent méconnus, sur lesquels ce chapitre jette un éclairage inédit ;
  • Calvo, Gir, Tardi publiés par Futuropolis en 1974, marquent l'émergence de nouvelles catégories d'acteurs dans le paysage de la bande dessinée. Consacré à l'émergence d'une édition alternative, ce chapitre en explore les différentes facettes ;
  • Les Frustrés de Claire Bretécher (1975) se penche sur le statut singulier occupé par Claire Bretécher dans le champ de la bande dessinée : seule autrice reconnue dans la période, sa consécration témoigne des mécanismes de domination masculine à l'oeuvre dans le neuvième art. Le "neuvième art" a ainsi largement été écrit au masculin singulier. L'oeuvre de Claire Bretécher est également singulière en ce qu'elle passe par l'auto-édition, et gagne des sphères culturelles singulières. Une présentation de cet album a été proposée au Collège de France, et est visible en ligne ici : https://www.college-de-france.fr/agenda/seminaire/quelques-albums-incontournables/les-frustres-de-claire-bretecher
  • La Ballade de la mer salée d'Hugo Pratt (1975), enfin, explore les liens entre bande dessinée et littérature, et revient sur la naissance éminemment paradoxale de ce "roman graphique".

Si vous voulez acquérir l'un de ces ouvrages, merci de privilégier les librairies indépendantes (par exemple via la plateforme leslibraires.fr) : en France, le prix du livre est fixe, il est donc identique quel que soit l'endroit où vous l'achetez, et les librairies jouent un rôle essentiel de diffusion des savoir !

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