Mes recherches portent sur les spécificités du pouvoir princier à la fin du Moyen Âge, principalement en Flandre, en Artois et en Bourgogne. Les enjeux d'incarnation de ce pouvoir,  ses traductions spatiales,  ses bases sociologiques et intellectuelles,  ses formes institutionnelles et  ses spécificités culturelles forment l'essentiel de mes travaux qui concernent tout particulièrement les comtes d'Artois et de Bourgogne puis les ducs Valois de Bourgogne, du milieu du XIVe à la fin du XVe siècle.

En premier lieu, l'exercice du pouvoir par le prince lui-même constitue un premier champ d'études : compétences comptables des princes, stratégies politiques autour de l'usage du secret, rapport spécifique des princesses à un pouvoir auquel elles participent-malgré de nombreuses limitations. La participation du prince et plus particulièrement des princesses au processus de décision constitue un angle d'approche assez fécond pour cerner le rôle personnel de celui ou celle qui hérite d'un droit à gouverner les autres. A ce titre, mon Habilitation à diriger les recherches a permis de montrer le rôle d'une princesse capétienne, Marguerite de France, dans le gouvernement des comtés de Flandre, d'Artois et de Bourgogne.

Le pouvoir princier se comprenant dans son interaction avec d'autres entités, je me suis également intéressé à la question des frontières, tout particulièrement aux limites de l'Artois et du Calaisis anglais durant la guerre de Cent ans; mais aussi aux rapports du prince avec les villes, sous l'angle de l'impôt, de la place des officiers du prince dans les grandes villes du nord, tout spécialement en Artois. Cette question a également nourri une réflexion plus globale sur le secret dans l'exercice du pouvoir princier, à l'intérieur des cercles de la cour comme dans les rapports avec les autres puissances.

Dans la mise en oeuvre de ce pouvoir, le rôle des institutions prend une place de plus en plus forte du fait d'une spécialisation des missions assumées par le conseil du prince (justice, finances...). Les pratiques complexes du maniement des finances permettent au prince de tirer profit de formes dématérialisées de transferts de fonds, mais rendent le contrôle d'officiers parfois trop habiles plus délicat. Ce processus entraîne également la formation de structures pérennes nouvelles, souvent innovantes mais rarement présentées comme telles dans un souci d'afficher une continuité avec le passé: une stratégie consistant à avancer à reculons vers davantage de bureaucratie et de centralisation. Par ailleurs, ces changements modifient la nature même des documentations : les formes comptables évoluent pour répondre à des besoins plus complexes et témoignent d'une dextérité de plus en plus grande, se faisant même parfois les vecteurs d'un discours sur le politique.

Parce que ce pouvoir reste cependant incarné par des êtres de chair et de sang, il est indispensable de s'intéresser aux officiers et à l'entourage des princes : les logiques de recrutement et de carrière du personnel  (conseillers, comptables, baillis) mêlent enjeux sociaux (présence ecclésiastique particulièrement sensible dans les milieux bureaucratiques, rôle de la noblesse et de la bourgeoisie), question des compétences et des cultures bureaucratiques (montée en puissance du statut d'expert, culte du secret), problème de l'attrait du service du prince (dons, rémunérations) y compris sous leur aspect le plus sulfureux (corruption, détournements).

Enfin divers aspects culturels relatifs à l'histoire des princes et de leurs entourages nourrissent ma recherche : en particulier les enjeux liés à la culture matérielle, qu'il s'agisse de l'alimentation, des pratiques de mobilité et de circulation des cours ou des officiers, ou aux dévotions. Ce point a été particulièrement développé dans mon mémoire d'habilitation attaché à l'analyse de l'art d'être princesse au XIVe siècle.

 

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